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Prévention des démences de l’âge avancé : pas de baguette magique

mise en ligne le 1er janvier 2018

 

Des études récentes instructives

Selon le Centre des pratiques fondées sur la preuve (EPC) du Minnesota les interventions actuelles sont peu efficaces dans la prévention de la démence au cours de la vieillesse.

Une nouvelle méta-analyse de quatre revues suggère qu’il n’y a pas suffisamment de preuves d’un lien entre activité physique, médicaments prescrits, vitamines, suppléments nutritionnels ou entrainement cognitif pour prévenir les démences de l’âge avancé.

 L’académie américaine de médecine confirme ce constat en affirmant qu’il existe certes des résultats positifs inexpliqués pour l’activité physique, l’entrainement cognitif et les interventions dites multidomaines mais qu’aucun d’entre eux n’approche le niveau de preuve pour faire l’objet de recommandations par l’USPSTF (United States Preventive Services Task Force) [1]

A noter toutefois que les résultats de l’étude FINGER (Finnish Geriatric Intervention Study to Prevent Cognitive Impairment and Disability) et de l’étude CAIDE (CAIDE (Cardiovascular Risk Factors, Aging and Dementia) sont moins pessimistes. Ils montrent que, parmi 1260 personnes âgées de 60 à 77 ans, celles qui ont bénéficié d’une intervention associant activité physique, régime alimentaire et entrainement cognitif ont vu s’améliorer de 25 % leurs tests neuropsychologiques au bout de deux ans par rapport au groupe contrôle ne recevant aucune intervention. De plus, l’éventualité de l’apparition d’une à plusieurs nouvelles maladies chroniques est réduite au bout de ce délai [2].

Quid de l’entrainement cognitif ?

Une méta-analyse des effets bénéfiques de la prévention par l’activité intellectuelle tend à montrer que les adultes âgés en bonne santé en tirent bénéfice en termes de performance cognitive. Toutefois, cette amélioration n’apparait que dans le domaine ayant bénéficié d’un entrainement, par exemple celui de la mémoire. Pour les patients souffrant déjà d’un déficit cognitif léger, aucun bénéfice n’est prouvé [3].

Qu’en est-il de l’activité physique de type aérobie, en résistance ou du tai chi ?

Elle pourrait provoquer une certaine amélioration cognitive, mais de faible niveau de preuve, en se combinant à d’autres interventions simultanées : entrainement cognitif, autre activité physique, régime alimentaire. [4]

Médicaments, vitamines et suppléments [5]

Aucune protection médicamenteuse n’a été mise en évidence, que ce soit chez des individus normaux ou ceux qui souffrent de troubles cognitifs légers.

Les effets iatrogènes adverses concernaient surtout des substances non utilisées en France dans ce but : œstrogènes (AVC), œstro-progestatifs (AVC, coronaropathies, cancers du sein invasifs et embolies pulmonaires) et raloxifène (TVP).

Pas d’action favorable avec des vitamines (vitamine B, vitamine D avec calcium, vitamine C ou beta carotène), des suppléments nutritionnels tels que les acides gras omega-3, le soja, le ginkgo biloba ou des ingrédients multiples.

Il semble que la supplémentation marche mieux chez des personnes dont la consommation alimentaire ou en vitamines est faible.

Une autre étude produit des résultats encourageants mais ne permet pas de conclure dans le domaine de la prévention des démences ; elle associe trois interventions : entrainement cognitif, maitrise de la pression artérielle et activité physique accrue.

En conclusion

Dans l’état actuel de la science, on peut se demander si les conclusions des études sont tout simplement décevantes ou bien si les essais ont démarré trop tard pour produire un résultat. Les problèmes méthodologiques sont nombreux dans la littérature actuelle et devront être corrigés dans l’avenir. Il conviendra d’utiliser des tests cognitifs cohérents, un suivi plus long des personnes et reconnaitre que l’attrition est un problème majeur dans les études au long cours [note 1]. Enfin, il faudra comprendre la relation entre l’amélioration consécutive aux interventions et l’apparition d’un déficit cognitif léger ou d’une démence [6].

Références :

[1] Interventions Unproven for Preventing Late-Life Dementia. Little benefit seen in meta-analyses for exercise, "brain training," nutrition supplements. By Alexandria Bachert MPH, Staff Writer, MedPage Today December 18, 2017

https://www.medpagetoday.com/neurology/dementia/69970?xid=nl_mpt_Weekly_Education_2017-12-27&eun=g7122902d1r

[2] Marengoni A, Rizzuto D, Fratiglioni L, Antikainen R, Laatikainen T, Lehtisalo J, Peltonen M, Soininen H, Strandberg T, Tuomilehto J, Kivipelto M, Ngandu T. The Effect of a 2-Year Intervention Consisting of Diet, Physical Exercise, Cognitive Training, and Monitoring of Vascular Risk on Chronic Morbidity-the FINGER Randomized Controlled Trial. J Am Med Dir Assoc. 2017 Nov 3.

[3] Butler M, McCreedy E, Nelson VA, Desai P, Ratner E, Fink HA, Hemmy LS, McCarten JR, Barclay TR, Brasure M, Davila H, Kane RL. Does Cognitive Training Prevent Cognitive Decline? A Systematic Review. Ann Intern Med. 2017 Dec 19.

[4] Brasure M, Desai P, Davila H, Nelson VA, Calvert C, Jutkowitz E, Butler M, Fink HA, Ratner E, Hemmy LS, McCarten JR, Barclay TR, Kane RL. Physical Activity Interventions in Preventing Cognitive Decline and Alzheimer-Type Dementia: A Systematic Review. Ann Intern Med. 2017 Dec 19

[5] Butler M, Nelson VA, Davila H, Ratner E, Fink HA, Hemmy LS, McCarten JR, Barclay TR, Brasure M, Kane RL. Over-the-Counter Supplement Interventions to Prevent Cognitive Decline, Mild Cognitive Impairment, and Clinical Alzheimer-Type Dementia: A Systematic Review. Ann Intern Med. 2017 Dec 19.

[6] Kane RL, Butler M, Fink HA, Brasure M, Davila H, Desai P, Jutkowitz E, McCreedy E, Nelson VA, McCarten JR, Calvert C, Ratner E, Hemmy LS, Barclay T. Interventions to Prevent Age-Related Cognitive Decline, Mild Cognitive Impairment, and Clinical Alzheimer’s-Type Dementia [Internet]. Rockville (MD): Agency for Healthcare Research and Quality (US); 2017 Mar. Available from

·         http://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK442425/

·         https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmedhealth/PMH0096221/pdf/PubMedHealth_PMH0096221.pdf


[note 1] Attrition : l’attrition dans les enquêtes longitudinales est la perte d’individus de l’échantillon au cours du temps (source Wikipédia)


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